Deux compréhensions de la probabilité

De trois à deux compréhensions

  • On commence par mettre de côté la compréhension énumérative de la probabilité : on dispose d'une population finie d'individu sur laquelle tous les attributs sont connus exhaustivement.

    → il ne sera plus question ici de cette compréhension, limitée à la possibilité d'exercices de compte.

  • On retiendra ensuite un classement des concepts de probabilité très simplifiée en deux compréhensions.

Les deux compréhensions

  • Existent dès l'émergence et se poursuivent (et se complexifient) ensuite

  • Visibles chez les philosophes des sciences et chez les mathématiciens/statisticiens

  • Différentes terminologies

    • Desrosières : subjective vs objective

    • Celle qu'on utilise ici → Hacking: épistémique vs fréquentiste

  1. probabilité épistémique : degré de croyance, éventuellement garanti par des éléments de preuves

  2. probabilité fréquentiste : tendance des dispositifs aléatoires à produire certains résultats avec des fréquences stables

Deux compréhensions dès l'émergence de la probabilité

Par exemple chez les jansénistes de Port-Royal

  • Trois personnages ont écrit La Logique de Port-Royal (1662)

    • Blaise Pascal (1623-1662), auteur des Pensées (1670)

    • Antoine Arnauld (1612-1694)

    • Pierre Nicole (1625-1695)

  • Probabilité fréquentiste: calculs introduits par Arnauld

  • Probabilité épistémique et « Pari de Pascal »

  • Chez Pascal, a des moments différents de sa vie, on trouve ces deux compréhensions.

Deux compréhensions chez Blaise Pascal

  • Probabilité fréquentiste

    • Période mondaine

    • Problème des paris (1654) posé par le chevalier de Méré

lorsqu'on lance plusieurs fois deux dés, combien faut-il de coups au moins pour qu'on puisse parier avec avantage que, après avoir joué ces coups, on aura amené [double six]

  • Probabilité épistémique dans la Logique de Port-Royal

DémonstrationLe pari (épistémique) de Pascal

  • Contribue à l'apologie divine

  • Pascal n'emploie jamais le mot « probabilité »

  • Paru dans les Pensées (1670) mais résumé dans La Logique de Port-Royal (1662)

  • Les prémisses du pari

    • Aucune preuve ni réfutation scientifiques de l'existence de Dieu n'est valide

    • Les preuves métaphysiques sont si éloignées du raisonnement humain et si compliquées qu'elles sont sans force

    • Il n'y a que deux situations

      1. Il n'y a pas de Dieu

      2. Il y a un Dieu et c'est celui qui est prôné par l'Église

Il y a trois niveaux de démonstrations selon trois notions définies par Pascal

1. Dominance: une décision est meilleure que toute autre, quelle que soit la situation

  • Situations \(S_1\), \(S_2\), ...

  • Actions \(A_1\), \(A_2\), ...

  • Utilité d'accomplir \(A_j\) dans la situation \(S_i\): \(U_{ij}\)

  • \(A_j\) est dominante sur toutes les autres actions si \(\forall S_i\), \(U_{ij} > U_{i(- \bf{j})}\)

Deux autres niveaux non abordés ici

2. Espérance

3. Espérance dominante

Décision selon la dominance

  1. Si Dieu existe

    • Parier sur sa non-existence conduit à la damnation

    • Parier sur son existence conduit au salut

  2. Si Dieu n'existe pas, les deux actions conduisent à un même résultat

  3. Le salut est préférable à la damnation

\(\Rightarrow\) l'existence de Dieu domine sa non-existence

Deux compréhensions chez les philosophes des sciences

Carnap : \(proba_1\) et \(proba_2\) puis probabilité inductive (épistémique) et probabilité statistique (fréquentiste)

Russell : crédibilité (épistémique)

Popper : propension

Deux compréhensions chez les math/stat

  • Poisson (1837) et Cournot (1843) : chance vs probabilité

  • Probabilité fréquentiste → Von Mises, Kolmogorov, Neyman, Venn, Fisher

  • Probabilité épistémique → deux écoles

    • Objective : relation logique entre hypothèse et données: \(p(h|d)\) est le degré auquel \(d\) implique \(h\) (Jeffreys, Keynes)

    • Subjective : question de jugement personnel (Ramsey, Savage, de Finetti)